mardi 12 juillet 2016

Objectifs du développement durable - jour 3

La troisième journée de l'école d'été était consacrée à la santé. L'obectif 3, dont j'ai déjà parlé, lui est explicitement dédié, mais c'est un secteur qui est présent dans plusieurs autres objectifs. Et la réalisation d'autres objectifs, tels que la réduction de la pauvreté, une alimentation convenable ou encore l'accès à de l'eau propre, permettra à l'évidence d'améliorer les conditions de santé des populations.

L'un des points qui est revenu très fortement dans plusieurs interventions concerne l'échelle à laquelle il faut agir. L'échelle locale la plus fine est indispensable, a notamment répété Christophe Rogier, du service de santé des armées. Pour tenir compte de la géographie, dans des questions aussi élémentaires que l'acheminement des médicaments. Et aussi pour tenir compte de la perception des maladies par les populations. Il a cité l'exemple de Madagascar, dont il a dirigé plusieurs années l'Institut Pasteur, où la perception du paludisme, et de sa gravité, diffère d'une région à l'autre : on peut s'attendre du coup à ce qu'un programme de soins et de prévention identique soit reçu et mis en oeuvre différemment.

Cette nécessité de prendre en compte les représentations des populations, et donc d'élaborer avec elles les projets, a été à mon avis magnifiquement illustrée par une question de l'un des participants dans la séance de l'après-midi.

Au cours de cette séance, notamment, Martine Peeters, de l'IRD, a présenté les résultats de ses travaux sur l'origine de l'épidémie de VIH/Sida. En très résumé, le VIH est un virus qui a été transmis à l'homme par les grands singes, chimpanzé et gorille, à plusieurs reprises, dans les années 1920. Et l'épidémie a réellement démarré de Kinshasa, aujourd'hui en République démocratique du Congo, vers 1960.

L'un des participants de l'école d'été, donc, qui s'est présenté comme géographe, a fait part de doutes quant à l'origine du virus : beaucoup pensent en Afrique, a-t-il dit, que c'était à l'origine un virus "expérimental" (sous entendu qui serait sorti, volontairement ou pas, d'un laboratoire). En outre, comment se fait-il, a-t-il poursuivi, que l'on n'entende plus parler du vaccin "auto-immune" mise au point par "un éminent professeur camerounais"?

Parmi les spécialistes présents, aucun doute : la rumeur d'un VIH "inventé" par les occidentaux pour attaquer sournoisement l'Afrique a été scientifiquement réfutée depuis longtemps. Quant aux traitement disponibles et réellement efficaces, il ne s'agit que des anti-rétroviraux, et aucun vaccin n'est malheureusement en perspective. Les chose ont été clairement mises au point.

J'ai tendance à penser toutefois que si un professeur d'université relaie ce type de représentations erronées, elles doivent être monnaie courante dans son pays. Et qu'il est bien nécessaire de le savoir, et d'en tenir compte, lorsque l'on prépare un programme concernant cette maladie.

En outre, ce n'est qu'un exemple parmi bien d'autres. Les anthropologue de la santé doivent continuer à travailler pour mieux comprendre les représentations que les gens se font des maladies, et donc des nécessités et des possibilités, ou non, de les traiter. Et il doivent être associés dès leur conception aux programmes de santé publique, afin de partager ces connaissances, voire de produire celles qui se révéleraient utiles.

Je prêche aussi pour ma paroisse : la vulgarisation de la science en Afrique est nécessaire. Le "nationalisme" africain, qui fait accepter à beaucoup sans esprit critique toute annonce de découverte extraordinaire pour peu qu'elle soit défendue par un chercheur africain, existe. Faire connaître les véritables découvertes, peut-être pas toutes extraordinaires mais plus réelles, des chercheurs africains pourrait faire changer un peu cet état de fait. Pour ce qui concerne le Sida, qui sait que le HIV-2, forme du virus initialement spécifique à l'Afrique de l'ouest, a été découverte grâce à une très forte contribution d'un laboratoire sénégalais?

1 commentaire:

  1. I like this "Je prêche aussi pour ma paroisse : la vulgarisation de la science en Afrique est nécessaire."

    RépondreSupprimer