favorisent la contamination.
Les bilharzioses sont des maladies
parasitaires endémiques en Afrique tropicale et sub-tropicale. Pour
prendre des mesures de lutte efficace à l'échelle de tout un pays,
il faut savoir précisément comment ces maladies s'y diffusent.
C'est pour répondre à cette question qu'une équipe de l'Institut
international d'ingénierie de l'eau et de l'environnement, à
Ouagadougou, au Burkina Faso, avec des collègues Suisses, Italiens
et Américains a réalisé une modélisation couvrant tout le Burkina Faso. Leurs résultats soulignent en particulier que les retenues
d'eau construites pour l'irrigation sont un important facteur de
risque, qu'il faudra prendre en compte pour parvenir un jour à l'éradication.
Les bilharzioses sont provoquées chez
l'homme par des vers du genre Schistosoma (ce
qui leur vaut aussi le nom de schistosomiases). Une personne
est contaminée lorsqu'elle est en contact avec de l'eau contenant
des formes larvaires du ver nommées cercaires. Celles-ci pénètrent
par les pores de la peau, et s'installent dans les
vaisseaux sanguins, où elles se développent jusqu'au stade adulte.
Les femelles pondent ensuite leurs oeufs dans des capillaires
sanguins proches des intestins ou de la rate, en fonction de
l'espèce.
Ces oeufs connaissent deux destins bien
différents. Une partie d'entre eux créent des lésions des organes,
et des réactions du système immunitaire. En bref, ils rendent
malade la personne infectée, maladie qui peut aller jusqu'à la mort
en l'absence de traitement.
L'autre partie des oeufs sont excrétés
par les selles ou l'urine de la personne. Et s'ils arrivent dans de
l'eau douce, ils peuvent pénétrer dans un mollusque, du genre
Bulinus ou Biomphalaria. Celui-ci est infecté par le
premier stade larvaire du schistosome, la miracidie. A l'abri dans le
mollusque, les miracidies se développent en cercaires. Lorsque ces
dernières sont relâchées dans l'eau, elles sont prêtes à
infecter un nouvel hôte humain.
Des traitements médicamenteux existent
pour prévenir le développement des schistosomes dans l'organisme.
Mais sur les 261 millions de personnes qui en auraient eu besoin dans
le monde en 2013, selon l'Organisation mondiale de la santé, un peu
plus de 40 millions seulement en ont bénéficié. Au Burkina Faso,
des campagnes massives de traitement médicamenteux ont été menées
au milieu des années 2000. Mais bien qu'elles ont fortement réduit
la prévalence des bilharzioses dans le pays, elles n'ont pas suffit
à les éradiquer. Et surtout, dans certaines zones, cette prévalence
est aujourd'hui revenue à 30%, son niveau antérieur au traitement.
Pour mieux comprendre quels sont les
facteurs importants dans la diffusion de ces maladies parasitaires,
les chercheurs ont donc décidé de modéliser, pour la première
fois, leur diffusion à l'ensemble du Burkina Faso. Ils ont pour cela
représenté le pays sous la forme de 10 592 agglomérations, et ils
ont étendu un modèle déjà utilisé sur des zones géographiques restreintes.
Celui-ci a la forme d'une série d'équations reliant des variables
telles que la population des agglomérations, la mobilité des
populations, la répartition spatiale des mollusques Biomphalaria
pfeifferi (seule espèce retenue pour cette modélisation) ou encore les
densités des différents stades larvaires dans l'eau.
En examinant quels sont les paramètres
les plus importants pour expliquer la diffusion du parasite, et la
réinfestation de zones où celui-ci est peu ou pas présent, ils se
sont aperçu que la présence d'étendues d'eau est déterminante. En
effet, celles-ci fournissent un habitat stable au mollusque, dont la
présence est indispensable dans la chaîne de contamination. Dans un pays dont le nombre de retenues
d'eau, surtout pour l'irrigation, a été multiplié par cinq depuis
60 ans, ce n'est pas anodin.
Les scientifiques font en particulier
remarquer que la prévalence est généralement faible dans les zones
les plus densément peuplées. Celles-ci correspondent aux zones urbaines,
où il n'y a pas de maraîchage, d'agriculture ou de pêche,
principales activités au cours desquelles les hommes sont
contaminés. Mais elles correspondent aussi aux zones de départ et de destination des flux de déplacement les plus importants.
Ils alertent donc sur le risque de
développer des retenues d'eau dans de telles zones. Le rôle de la
mobilité humaine dans la réinfestation étant aussi mis en lumière par l'analyse de leur
modèle, la conjugaison d'une forte mobilité et de conditions
favorables au développement du parasite irait à l'encontre d'une
éradication de celui-ci au niveau national.
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